Hier matin, au centre de débarque de Barfleur. Joe Borg (à droite) découvre le savoir faire de la filière pêche bas-normande.
C'est la première fois qu'un commissaire européen à la pêche vient en Basse-Normandie. Il a écouté les professionnels.
Pour les pêcheurs, le commissaire c'est un peu le père fouettard. « Vous savez que vous représenter l'administration qui les fait souffrir, eux et leurs familles ! » Malgré cette réflexion, les pêcheurs sont venus pour discuter. « C'est la première fois qu'on peut le faire en direct. »
Joe Borg est là pour entendre. L'homme connaît ses dossiers. Dans la salle du conseil de la communauté d'agglomération, les présentations se succèdent. Et les chiffres tombent. « En 2008, la production a été de 21 000 tonnes, en baisse de 28 %. Le chiffre d'affaires, 46 millions d'euros, est en baisse de 22 %. Sur 240 navires répartis en 11 ports de pêche, il ne reste que 20 chalutiers hauturiers. 8 sont sortis de flotte en 2008, 15 sorties de flotte pour les chalutiers côtiers. » Il y a aussi le problème des quotas de pêche, du pétrole, du cabillaud, de certaines espèces de raies désormais interdites à la vente, de la crise en général.
Et dans ce fatras de réglementations (840), les pêcheurs de Basse-Normandie ne s'y retrouvent plus ou pas. « Faites attention à ce que nous aussi, nous ne devenions pas une espèce en voie de disparition ! »
Restructurations
Joe Borg écoute. La dialectique est habile. L'ancien ministre des Affaires étrangères de Malte sait désamorcer les conflits. Quand on lui demande s'il peut faire quelque chose pour les restructurations de la flottille (les bateaux sont anciens), il répond : « A mon sens, il faut poursuivre les restructurations, malgré la baisse du prix du pétrole. Faites remonter vos avis si vous estimez qu'il y a des points à améliorer. Mais la France seule n'est pas suffisante pour imposer des changements. Nous avons besoin d'un dossier solide. » Et il donne ses priorités : « La pêche doit être une filière durable. J'ai clairement indiqué que nous voulons diminuer la pratique de rejet de poissons morts à la mer. Comment faire ? Il faut en débattre. »
Permis à points
Sur la question de Natura 2000 qui inquiète les pêcheurs de la Manche, le commissaire est clair : « Il y aura des restrictions de pêche dans ces zones. Mais cela ne signifie pas que la pêche y sera interdite. Il faudra mettre en place un système d'autorisations. » Joe Borg évoque aussi le permis à points, qui pourrait être instauré pour les pêcheurs. « Nous n'inventons rien. C'est une proposition. Il y a des règles communes. Et il faut que nous ayons la garantie que ces règles soient respectées. »
Eric Le Guisnel, un pêcheur de Granville, a l'impression d'écouter la messe : « On nous impose des réglementations, sans aucune concertation. Sur la sécurité par exemple. Une balise supplémentaire sur mon bateau, c'est un mois de salaire qui s'envole. Est-ce que vous avez prévu des financements pour tout ça ? »
On verra. Il faut ajuster les mesures d'ici 2012, où le nouveau plan de politique commune des pêches sera connu. Daniel Lefèvre, le président du comité régional était impatient de cette rencontre. Il en tire un bilan mitigé. « C'est la première fois qu'un commissaire européen s'intéresse à la Basse-Normandie. Au moins, nous existons ! »
Thierry DUBILLOT
source:
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